Les sculpteurs du temps. À propos de Dimitri Fagbohoun et Emmanuel Rivière (Myriam Odile BLIN)

Résumé

« Se réveiller dans un autre temps, c’était naître une seconde fois, adulte », Chris Marker, La jetée.
« Ainsi l’homme est passé d’un ordre de la nature à un autre, Jusqu’à ce qu’il devint sage et savant et fort, comme il l’est à présent, De ses premières âmes il n’a maintenant point de souvenance, Et il sera de nouveau changé à partir de son âme actuelle» (Rûmi, cité par Souleymane Bachir Diagne).
Passé, présent et futur. Antériorité, intériorité et extériorité, avenir. Comme dans un brassage du temps, les sculptures de Dimitri Fagbohoun et d’Emmanuel Rivière renvoient à des archétypes fondateurs tout en mettant le futur en perspective. Ligne en boucle ou ligne qui se déploie avec ses parallèles, ses chronologies et ses perspectives. Ligne de l’infini, horizon du ciel. « Papa was a rolling stone », installation de Dimitri Fagbohoun, est une œuvre funéraire qui renvoie à un passé révolu et à la mort du père. Mais la mort appartient-elle au passé ou au futur ? Temps cyclique, temps chronologique du Kronos, temps du Kaïros ou temps de l’éternité, les différentes modalités du temps inscrivent dans les sculptures réalisées par Dimitri Fagbohoun et Emanuel Rivière le passé aussi bien que l’avenir. L’un et l’autre se sont inspirés des masques africains. Masques Bamoun du Cameroun, Fang, Baoulé ou Sénoufo ne nous offrent qu’à moitié leurs secrets parce qu’en eux gisent les traces de sociétés plus ou moins révolues, inaccessibles, qui nous échapperont toujours.